L’église Hillsong France que je vois aujourd’hui mérite-t-elle vraiment ses avantages fiscaux ?
Lettre ouverte à la communauté évangélique, aux autorités publiques et au Conseil d’Administration de Hillsong France.
Image : Page d’accueil du site de Hillsong France
Paris, le 26 novembre 2023.
En tant qu’ex-membre de la communauté Hillsong et de l’équipe créative, j’ai occupé un poste clé dans la stratégie de levée de fonds et de fidélisation de l’organisation Hillsong. En France, la marque australienne est-elle à la hauteur des promesses philanthropiques qui lui valent un régime fiscal proche de celui des Restos du cœur, OXFAM, ou Amnesty International ?
Je ne pense pas. Et à ce titre, j’aimerais d'ailleurs que l’église Hillsong France reverse l’intégralité des dons que je lui ai faits à des associations caritatives qui œuvrent véritablement à propager un message de solidarité, d’amour et de paix dans le monde.
Je suis le dindon de la farce d’un banquet luxurieux, organisé par Hillsong
L’église Hillsong n’est pas qu’une église, c’est une marque internationale. Je n’aurais jamais imaginé écrire ces lignes, il y a tout juste un an, lorsque je suis partie pour de bon. J’ai rejoint la communauté en 2013, j’ai commencé à servir en tant que bénévole au sein de l’équipe créative en 2015 et j’y ai intégré une position de leadership en 2017.
En 2020, j’ai rejoint le staff de l’équipe créative en tant que freelance et soutenu l’organisation pendant les confinements. J’ai même servi de token lorsque le monde avait les yeux rivés sur les manifestations Black Lives Matter. Un token est le “profil diversité” qui permet à une organisation de dire : “Je ne suis pas raciste, il y a une femme métisse dans mon équipe”.
Vous vous imaginez donc bien que j’ai vu, entendu et subi certaines facettes de l’organisation qu’il est impossible de percevoir lorsqu’on ne s’y rend qu’une fois par semaine. Bien sûr, aucune structure n’est parfaite, elle reflète les travers des êtres humains qui la composent. J’ai longtemps pensé que cela n’empêchait pas l’église d’impacter positivement la communauté où elle est implantée. Spoiler : je me suis bel et bien trompée et peut-être aurais-je l’occasion de revenir sur mon expérience personnelle en détail.
La gouvernance de Hillsong mise en cause en Australie et en France
« Les actes parlent plus que les mots » a écrit un jour un ancien responsable d’Hillsong France, alors qu’il annonçait son départ précipité de l’organisation au staff. Mis au placard pour avoir été une voix dissonante et avoir challengé le récit de la direction, il a pointé du doigt le profond manque de redevabilité dans le modèle de l’organisation. Selon ses dires, l’église est « malade, en mauvaise santé et en danger. »
Si vous vous intéressez un peu aux structures de communautés, vous savez sans doute que la redevabilité est essentielle dans une organisation : elle oblige les personnes décisionnaires à prendre des décisions qui bénéficient à l’ensemble de la communauté, plutôt que de servir les intérêts personnels d’un petit groupe. Sans redevabilité, votre organisation ressemble à une mafia ou à une oligarchie.
La redevabilité est aussi au centre du système de défiscalisation des dons aux associations en France. Comme le rappelle le site du ministère de l’économie, pour bénéficier de dons défiscalisés, une organisation doit remplir trois conditions : 1) avoir un but non lucratif, 2) avoir un objet social et une gestion désintéressée, et 3) ne pas fonctionner au profit d'un cercle restreint de personnes.
Mais que fait la police des œuvres caritatives ?
Cette notion même de redevabilité a été, la même année, au cœur des discussions qui ont mené à l’éviction de Brian Houston, cofondateur de l’église Hillsong en 1983, et à la refonte du modèle de gouvernance de l’église en Australie. Le fait qu’elle soit mise en cause par une figure de leadership de l’organisation en France aurait dû être discutée par l’ensemble des gens affectés par le leadership et ceux qui, comme moi, ont fait/font des dons pour que l’organisation continue de croître.
La Maison Mère d’Hillsong en Australie est aujourd’hui accusée de malversations financières et d’évasion fiscale. Je ne m’étendrai même pas sur la débâcle des filiales américaines de Hillsong depuis 2020. Pourquoi l’alerte sur la gouvernance de Hillsong France n’a-t-elle pas donné lieu à une enquête ? Quel niveau de transparence doit-on attendre d’une organisation dont les revenus s’élevaient à plus de 3 millions d’euros selon le rapport du commissaire aux comptes sur les comptes annuels de 20191 ? Les dizaines de départs de salariés depuis 2020 n’étaient-ils pas le signe qu’il y a un problème de gestion en France ? Combien de reportages et de documentaires sur le modèle bancal de la megachurch devrons-nous encore regarder avant de nous interroger ?
Même si j’ai aimé ma communauté de tout mon cœur, certains calculs me semblent aujourd’hui douteux. L’église Hillsong est construite sur les sacrifices de beaucoup : beaucoup de bénévoles, des offrandes financières records, des appels grandiloquents à impacter les nations… Et finalement quels sont les fruits d’une œuvre aussi colossale ?
Se soumettre aux autorités qui nous gouvernent
Vous ne le saviez peut-être pas, mais la débâcle de 2022 a également occasionné des démissions au sein du Conseil d’Administration de Hillsong France. « Je ne peux plus et ne veux plus cautionner une telle gouvernance » écrivait un ancien membre du Conseil pour expliquer son départ. Comme beaucoup de gens avant elle, cette personne pointe du doigt dans son mail d’adieu « la gestion du personnel (...) C’est là sans doute que je suis le plus profondément en désaccord avec les pasteurs. »
Et pour illustrer très justement son propos, elle continue avec une image forte : « Je constate aujourd’hui que cette belle église est en très mauvaise santé, à l’image de nos hôpitaux AP-HP. Nos staff sont à bout de souffle, maltraités par un système qui ne sait pas les écouter, les prend pour des pions ; nos bénévoles sont étirés et manipulés pour servir qui au final ? J’ose dire que je ne suis pas certaine que Dieu soit à l’origine de toute cette mise en scène pour paraître. »
La gestion des ressources humaines de l’organisation Hillsong France pose la question de la légitimité du cadre juridique dans lequel elle opère. Pour les quelques “privilégiés”, qui ne sont pas pasteurs, mais qui sont rémunérés pour leur service à l’organisation : pas de contrat de travail soumis au régime général. Que vous soyez RH, vidéaste, comptable, directeur artistique, directeur technique, on vous proposera au mieux d’être auto entrepreneur et d’être rémunéré à la facture, ou de bénéficier du même contrat “ministre du culte” que les pasteurs. Ce contrat est particulier, relève du régime très complexe de la CAVIMAC, et prive les personnes concernées d’une véritable protection sociale.
Optimisation fiscale et travail dissimulé ?
Pourquoi une église qui scande “aimer les gens” se passerait-elle d’une opportunité de mettre ses membres clés à l'abri, comme le reste de la société active en France ? Sans doute par souci d’économie : car ces contrats permettent de payer considérablement moins de cotisations sociales (puisqu’ils ne donnent droit à presque rien).
Une chose est sûre, l’affiliation des salariés de Hillsong France au régime social des cultes peut poser des questions de légalité. Voici ce que précise le site de la CAVIMAC sur les conditions d’affiliation des membres du staff : « Lorsque vos membres justifient bien de la "qualité cultuelle" et qu'ils résident bien sur le territoire français, ils doivent obligatoirement être affiliés à la CAVIMAC s'ils ne relèvent pas à titre obligatoire d'un autre régime de Sécurité sociale. Cette particularité du régime des cultes est appelée "principe de subsidiarité". L'affiliation à la CAVIMAC n'est entérinée qu'à la condition qu'un autre régime obligatoire de Sécurité sociale français ne soit pas compétent pour le rattachement de vos membres. »
On note également que ces contrats de ministre du culte ne vous protègent pas bien contre les abus. Devant quelle autorité pouvez-vous vous présenter en cas de litige avec l’église qui vous emploie ? Imaginez être maltraité au sein d’une organisation, n’avoir personne vers qui vous tourner pour vous protéger, et ladite organisation peut agir en toute impunité, car elle agit en dehors du cadre légal du droit du travail.
Ce choix de loger tous ces contrats, quels qu’ils soient, à la même enseigne du “ministre du culte” peut être perçu comme une optimisation fiscale, mais ce qui est légal est-il forcément éthique ? Laissez-moi reformuler cette question dans un langage bien évangélique : ce qui est légal reflète-il nécessairement la générosité du cœur de Dieu ? Et maintenant, laissez-moi poser une question de droit aux autorités publiques : dans quelle mesure cette “optimisation” peut-elle être assimilée à du travail dissimulé ?
La précarité de certains ministres du culte
En 2022, les départs des effectifs salariés de Hillsong France se sont multipliés et les mails dénonçant les conditions de travail du staff se sont mis à pleuvoir. La plupart des personnes concernées ont pointé du doigt un manque de transparence, un manque de redevabilité et un manque de reconnaissance de leur travail. Certains gros mots sont même utilisés (je laisserais les autorités publiques juger si c’est à juste titre ou non) : “maltraités” et “burn-out”. De quoi alerter sur ce qui est toléré dans la culture de l’organisation, n’est-ce pas ?
Lorsque vous travaillez pour l’organisation et que vous n’êtes pas pasteur, votre contrat n’est pas soumis aux conventions collectives qui régissent votre métier. Ces conventions collectives édictent notamment des grilles salariales de rémunération. Force est de constater qu’en plus de ne pas bénéficier d’une protection sociale conséquente, votre rémunération est très souvent en dessous du plancher conventionnel.
Cela signifie que votre travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur, pas juste celle que lui donne le marché, mais celle sur laquelle se sont entendus les partenaires sociaux de votre secteur d’activité et les représentants syndicaux de vos confrères. Je ne parle même pas du temps de travail et de l’engagement qui est attendu de la part du staff d’une église. Peut-on aimer les gens sans les honorer à leur juste valeur ?
Puisque les rémunérations du staff de l’église Hillsong sont issues des dons de la congrégation, les donateurs ne sont-ils pas en droit d’avoir de la visibilité sur le montant de ces rémunérations ? Ou du moins : élire des représentants au Conseil d’Administration, pour qu’ils puissent avoir leur mot à dire sur le système de rémunération ? On en revient encore une fois à la transparence et à la redevabilité.
“Rends l’argent !”
Où est l’argent, du coup ? Les finances de l’organisation sont-elles dans le rouge, pour justifier toute forme d’austérité budgétaire ? N’ayez crainte, je ne me lance pas dans une diatribe sur le cliché du lifestyle des pasteurs de megachurches. Pour rester neutre, je me contenterai de reprendre les chiffres communiqués par l’organisation.
Les membres de la congrégation donnent (généreusement) à l’église Hillsong selon leur cœur, de leur plein gré, et parce qu’ils sont convaincus d’œuvrer pour la propagation d’un message de paix et d’amour. Dans la culture évangélique, on parle de “Dîmes”, puisque certains fidèles choisissent de reverser 10% de tous leurs salaires à l’église, pensant honorer Dieu.
Il y a aussi des “offrandes” exceptionnelles, qui servent certains objectifs spécifiques comme soutenir des missionnaires, des organisations internationales, ou préparer un achat immobilier pour l’organisation. Rappelons que Hillsong France, implanté depuis plus de 15 ans dans le pays, n’est toujours pas propriétaire des bâtiments qu’elle occupe. Elle a toutefois investi dans l’achat de parts du théâtre parisien “Le 13ème Art”.
Le rapport financier de 2019 précité fait état de revenus de plus de 3 millions d’euros avec un budget de fonctionnement de plus d’1,5 millions d’euros. Le premier poste de dépenses est celui des locations de salles avec plus de 900 000 euros (à l’époque, les cultes de l’église se déroulaient au théâtre Bobino et à l’espace Saint-Martin à Paris, mais je ne sais pas s’il faut aussi prendre en compte ici les campus à Massy, Lyon, Marseille, Luxembourg et Genève).
À qui profite l’argent ? Lorsque j’œuvrais au sein de l’équipe de communication de Hillsong France, nous encouragions le don en mettant en valeur les actions sociales de l'organisation, comme Sers Ta Ville, et le soutien qu’elle apporte à d’autres organisations internationales comme SEL Compassion, Vision Rescue, A21, Preemptive Love, etc. Néanmoins, on peut se demander quelle part des dons de la congrégation était véritablement reversée à des œuvres de bienfaisance.
La campagne de dons “Un Cœur Pour La Maison”
Le premier poste de dépense de l’organisation étant, nous l’avons vu, les locations de salle, l’achat de locaux par l’organisation apparaît comme une décision de bon gestionnaire. Cet objectif fait l’objet d’une levée de fonds annuelle “Un Cœur Pour La Maison”. J’ai reconstitué dans le tableau ci-dessous les montants annoncés par Hillsong France pour cette campagne de levée de fonds spécifique :
Selon une source interne à l’organisation, 10% des dons issus de cette campagne sont reversés à des organisations internationales et 15% à l’association Sers Ta Ville. La part de l’offrande “Un Cœur Pour La Maison” consacrée à la justice sociale ne représente donc que 25%, alors que le discours de l’organisation se focalise beaucoup sur l’impact qu’elle a sur la société.
Image : extrait du rapport “Un Cœur Pour La Maison” 2023
Le reste des dons est soigneusement épargné en vue d’une opportunité d’achat immobilier qui tarde à arriver. Depuis plusieurs années, les responsables de Hillsong France montrent de l’intérêt pour l’achat de locaux dans le XIIème arrondissement de Paris. Selon mes sources, cette transaction financière représenterait 5 millions d’euros, que l’organisation se serait proposée de payer comptant en début d’année 2023. C’est finalement une autre église qui est parvenue à conclure le contrat d’achat.
Je ne remets pas en question le choix d’acquérir ses propres locaux. Bien qu’ayant donné de l’argent à Hillsong France, aucun membre du Conseil d’Administration ne m’a d’ailleurs demandé mon avis sur la manière dont les finances sont gérées. J’interroge néanmoins la pertinence d’un investissement immobilier, face à la nécessité d’investir suffisamment dans le staff de l’organisation, appelé à prendre soin du reste de la congrégation ? L’offrande “Un Cœur Pour La Maison” ne peut-elle pas assurer à Hillsong France d’avoir des fondations saines et solides dans la poursuite de son objet social, sa raison d’être ?
En conclusion
Dans cette saison d’inflation record, où les Restos du cœur ont annoncé devoir refuser du monde pour la première fois de leur histoire : peut-on tolérer qu’une organisation comme Hillsong France ne participe pas à l’effort de solidarité nationale à hauteur de ses moyens ? Si Hillsong préfère dépenser les millions d’euros qu’elle a à disposition dans des investissements mobiliers et immobiliers, plutôt que dans le soin porté ne serait-ce qu’aux membres de son staff, l’organisation ne devrait-elle pas être taxée comme une grande entreprise ?
Je laisserai mes lecteurs en juger. Toutefois, je ne m’arrêterai pas de publier sur le sujet tant que la question du statut fiscal des megachurches ne fera pas l’objet d’une discussion à l’échelle de notre société française.
Je n’ai pas besoin de l’argent que j’ai déjà donné à Hillsong France, pensant soutenir une cause philanthropique. Le Conseil d’Administration de l’association fera sans doute l’autruche face à ma demande de reversement ; mais il y a des génocides en cours, toujours plus de victimes de la pauvreté et de la crise climatique. Amnesty International a sans doute plus besoin de cet argent que le 13ème Art, le théâtre Bobino et les autres lieux parisiens dans lesquels l’organisation préfère investir.
Alors que le système Hillsong est observable chez de nombreuses megachurches évangéliques, ne devrions-nous pas nous inquiéter, en tant que société française, de la perpétuation d’un tel exemple ?
Outre-atlantique, face aux églises qui se comportent de plus en plus comme des firmes multinationales et bénéficiant d’avantages fiscaux plus intéressants que ceux des entreprises, le mouvement #taxthechurches (taxons les églises) prend de plus en plus d’ampleur. Faut-il le rappeler ? Le régime fiscal des congrégations est tellement intéressant que la famille Kardashian a fondé sa propre église ; de quoi attirer tous les loups dans la bergerie.
J’ose espérer que cet essai suscitera des conversations constructives sur le sujet. N’hésitez pas à me contacter pour témoigner ou pour réagir.
N’hésitez pas à corriger en commentaire ce qui vous semble être des informations inexactes ou erronées, ou à préciser certains points évoqués. Cet espace est un espace de discussion et d’écoute.
Excelsior,
Tiavina Kleber
Je n'ai pas pu mettre la main sur un rapport plus récent. Y a-t-il quelqu’un pour me le transmettre ? Si le rapport est supprimé depuis la publication de cet article, demandez-le moi par mail.
Bonjour Tiavina ! J’espère que tu vas bien ;)
Merci pour cet article, on peut voir que tu y as mis beaucoup de temps de recherche pour soulever des questions intéressantes.
Je rejoins le commentaire de Lise au début, sur les questions d’ordre juridique. Tu parles d’optimisation fiscale et de remettre en cause le régime fiscal de l’église Hillsong France. Sur les éléments que tu as apportés, je ne vois pas ce qui pourrait permettre une telle remise en cause. Comme tu l’as bien rappelé au début, pour être une association il faut répondre à trois critères : « 1) avoir un but non lucratif, 2) avoir un objet social et une gestion désintéressée, et 3) ne pas fonctionner au profit d'un cercle restreint de personnes ». Et plus loin tu poses la question : « Si Hillsong préfère dépenser les millions d’euros qu’elle a à disposition dans des investissements mobiliers et immobiliers, plutôt que dans le soin porté ne serait-ce qu’aux membres de son staff, l’organisation ne devrait-elle pas être taxée comme une grande entreprise ? ». Le fait de mettre des millions d’euros dans un projet immobilier ne fait pas de Hillsong une entreprise. Les sommes récoltées par Hillsong doivent être réutilisées pour son objet prévu dans ses statuts qui doivent avoir été déposés en Préfecture. L’achat d’un bâtiment peut faire partie de l’objet pour l’accomplissement de la mission si c’est bien justifié. Donc sur le plan légal, je ne trouve pas d’éléments qui puissent remettre en cause le régime de Hillsong.
Aussi (pour les lecteurs qui s’aventureraient dans cette partie des commentaires), il semble important de rappeler qu’une association cesse d’avoir un but non lucratif si ses bénéfices sont distribués entre « des personnes d’un cercle restreint ». Après salaires et frais de gestion, tout bénéfice doivent être réutilisés et réinvestis dans la mission de l’association précisée dans son objet.
Toutefois sur le plan moral, concernant l’utilisation des fonds récoltés par Hillsong tu soulèves plusieurs questionnements intéressants qui peuvent nous aider à avoir une réflexion plus poussée sur le modèle d’église que nous voulons voir se développer en France de manière générale. Tu poses plusieurs fois la question (je paraphrase) « est-ce qu’une église ne devrait pas investir plus dans les gens que dans des bâtiments » ? Au fond, si l’église investit plus dans des pierres inertes (bâtiment) que dans des pierres vivantes (ses membres), est-ce que nous remplissons notre rôle d’église dans le sens que Christ l’avait conçue ? C’est un sujet sur lequel travaillent beaucoup d’églises en France aujourd’hui. J’étais à une rencontre de leaders en septembre où j’ai pu voir beaucoup d’églises « hybrides ». Par exemple à Toulouse une église dans un café qui ne cherche pas à se développer sur un modèle conventionnel. Ou alors il y avait le témoignage de deux femmes qui ont mis en location un espace de coworking la semaine et qui bougent les meubles le week-end pour faire église. Au fond, qu’avons-nous besoin réellement pour rendre un culte à Dieu aujourd’hui ? Je pense qu’en tant qu’églises nous devons nous poser la question de trouver un juste équilibre entre investir dans un lieu convenable de réunion, mais également comme tu le dis, dans les personnes (financièrement et spirituellement). Je trouverais pertinent de mettre la lumière sur ces nouveaux types d’églises qui voient le jour partout en France (histoire d’avoir un peu de positif sur les églises évangéliques de temps en temps haha).
Tu as ensuite évoqué un autre sujet que tu as survolé (je trouve) : le bénévolat. Toutes les associations (églises ou non) ont recours à des bénévoles. C’est la base même de leur fonctionnement. Toutefois je pense que tu soulèves un point important : lorsque le service demandé dépasse la limite du raisonnable. Tu n’as pas vraiment approfondi sur ce sujet donc je vais parler de manière générale, je pense que sur le plan juridique il serait important de légiférer sur un cadre éthique du bénévolat. Il faudrait que nous ayons un curseur clair sur la quantité de travail gratuit qu’un bénévole peut fournir à une association avant de devenir « exploité ».
Ce qui touche à un autre sujet : l’utilisation du statut CAVIMAC. Sur ce sujet, je trouve ça plus que limite l’utilisation de ce régime à tout va. Après lecture de tes lignes, je t’avoue que j’aurais du mal à aller demander un suivi pastoral au vidéaste de l’église haha. Mettre tout le monde dans la catégorie pasteur alors qu’ils ne remplissent aucune fonction de pastorat ou de « services aux fidèles » (ce que requiert le statut CAVIMAC)… ça mérite d’être alerté à l’inspection du travail pour un petit contrôle. Il me semble qu’en tant qu’église, être dans la légalité c’est le minimum de nos standards, mais on est appelés à aller plus loin : nous devrions être des modèles à suivre (la lumière du monde n’est-ce pas ?).
Bref, merci pour cette lecture, j'en retire beaucoup d’interrogations sur le modèle d’église que nous devrions voir plus en France. J’espère que tu as trouvé une assemblée qui corresponde plus au modèle économique que tu recherches (avec un focus plus social et humanitaire du coup ;)). Et je pense que ces questionnements justement peuvent être constructifs et nous permettre à tous d’être créatifs sur la façon de penser et vivre l’église autrement. Merci <3
Bonjour Tiavina,
Cet article a attiré mon attention car il touche mon secteur d'activité.
Je ne fréquente pas Hillsong mais des membres de ma famille si et des amis également.
Je ne reviendrai pas sur le volet megachurch mais m'attarderai en revanche sur l'aspect légale auxquels vous faites références : fiscal et social (droit du travail). Je pense que malheureusement votre article souffre de plusieurs méconnaissances qui peuvent être dangereuses pour la liberté religieuse. En effet, les avantages fiscaux d'Hillsong sont ceux dévolus à toutes les associations culturelles en France. Est-ce qu'Hillsong est une église ? Si la réponse est oui alors l'avantage fiscal dont elle bénéficie n'a pas lieu d'être remis en question. Ensuite la convention collective à laquelle sont rattachés ses salariés ne dépend pas forcément de leur missions. Elle peut dépendre du secteur d'activité de l'organisation donc celle des ministres du culte semble également approprié.
Attention je ne réfute pas la nécessité d'un contrôle des finances des églises en France mais cette organisation fiscale et cette liberté sociale est une des bases de notre liberté d'opinion et de religion.
Je ne sais pas si vous connaissez les évènements récents qui ont inquiété les associations françaises militantes : la remise en question de leur avantage fiscaux par le ministre de l'intérieur du fait de leur plaidoyer et militantisme. Vous soufflez sur des braises qui peuvent avoir un impact pas juste sur l'église que vous avez quitté mais sur toutes les autres, et même sur les associations en général. Qu'Hillsong semble favoriser une élite de personnes, un cercle restreint de gens m'apparaît évident. Et c'est la dérive qui touche toutes les communautés dès lors qu'on se retrouve dans un entre-soi inhérent à la religion commune. Les croyants sont des pécheurs, graciés certes mais imparfaits. Et le surmenage est souvent le lot des serviteurs qu'ils soient pasteurs ou diacres. Je sais ce n'est pas un lot de consolation mais c'est une réalité.
Vous avez pris la bonne décision de la quitter pcq elle ne vois convenait plus, vous avez bien fait, il est important de se sentir bien dans son église. Mais est-ce que votre brûlot est vraiment utile? Nécessaire ? Valablement construit ?
Je n'en suis pas sûre.
En tout cas je vous souhaite de guérir des blessures causées par votre ancienne assemblée. Je suis également passée par là et on ne s'en relève pas facilement.
Soyez bénie
Lise-Audrey